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Pourquoi grand-père ne mourait plus
proză [ ]
trad. Rolland Szekey

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de [Uiuiu ]

2007-06-16  | [Acest text ar trebui citit în francais]  

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Automne-automne, feuilles tombées... châtaignes, noix, gouttes d’eau sur la vitre... Les eaux moins profondes, les rives plus pleines, plus de son, moins de farine...mais grand-père ne mourait toujours pas !
Le prêtre est venu et lui parla de la Vie d’Après. Miel, lait, ambroise, nectar...Le prêtre parlait en crachant, la salive glissait sur son menton. Au fur et à mésure qu’il parlait, le paradis lui donnait envie, c’était évident, il aurait mangé du paradis tartiné, il s’y serait enfoncé jusque par dessus la tête...mais grand-père ne mourait toujours pas.
Le docteur est venu et lui donna une ordonnance pleine de poisons. Il lui a dit que ses poumons étaient comme le gruyère, le foie pourri, le cœur feuille au vent et la tête un tonneau sans douves...mais grand-père ne mourrait toujours pas...
Il avait déjà cent soixante-treize ans...Nous étions très vieux, à peine bougions-nous auprès de lui, en titubant, en nous appuyant, en prenant des médicaments et des vitamines pour que l’on puisse lui préparer une tisane.
Chaque matin il se levait de son lit, s’asseyait sur la chaise haute au dossier sculpté, « le fauteuil vert », comme il aimait dire- et regardait par la fenêtre à la couronne du noyer, les gens qui passaient dans la rue, les nuages.
Grand-père a connu les deux guerres mondiales et attendait confiant la troisième. Il avait un shrapnel dans le ventre, des cicatrices profondes sur tout le corps, il avait mal aux articulations et encore d’autres et nous l’encouragions : Meurs, grand-père, repose-toi, un coin de verdure t’attend ,là il n’y a ni souffrance ni tristesse...Il prenait sa faux et marchait dout doux au fond du jardin et fauchait une glèbe. Ensuite il restait une heure appuyé contre le poirier et haletait doucement.
Lorsqu’on annonçait des catastrophes mondiales,, il souriait. La chute des astéroides, l’amicissement de la couche d’ozone, l’échauffement global, la disparition des espèces semblaient l’amuser. Il a commencé à apprendre l’anglais pour comprendre les infos sur les chaînes étrangères. Il écoutait tout le temps des infos, mai comme ça...au petit bonheur. Il ne prenait rien au sérieux, mais le fait qu’il minimisait sa propre mort nous exasperait.
Lorsqu’un de ses arrière petits-fils est mort il n’a même pas versé une larme à côté de son cercueil. Il a quitté le cimetière en chantonnant une mélodie, attentif au chemin en jouant avec sa canne dans les feuilles tombées. Nous avons mis bon ordre avec élégance et décence, quoique le pauvre gars était mort d’une cirrose, à cause de l’alcool. Nous avons cru qu’on allait tenter grand-père, que sa confiance en cimetière et en l’eternel va accroître. Pas question... Il allait plus souvent jouer aux quilles que visiter les tombes de la famille. Il n’en avait pas envie !
Il y a quelques années, une fille est restée enceinte avec lui. Une fille que nous payions pour lui faire le ménage de temps en temps. On est allés lui porter des fleurs à la maternité. C’est avec de la peine que nous traînions nos vieillesses sur les marches sur les marches de l’hôpital.
La fille a accouché d’un enfant mort. Il ressemblait parfaitement à mon grand-père. C’était lui, mort, comme s’il avait craché de son être la mort à travers le corps de cette femme-là. Il a ri, la tête en arrière devant le petit lit, de manière qu’on avait cru qu’il était devenu fou. Hors question...Il était parfaitement normal ! Dans l’après-midi il est allé jouer aux quilles et il les a tous battus. Au score !
Maintenant mes jours vont finir...J’ai appelé mon grand-père à mon chevet et je lui ai dit quelque chose sur la chose sur la sagesse acquise en cette vie. Il a tenu ma main et m’a souri compréhensif. Lorsqu’il est sorti de la pièce il m’a demandé si je ne voulais pas qu’il éteigne la lumière. Je lui ai fait signe que oui. Il a éteint la lumière et il est sorti.

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