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STUTTGART
poezie [ ]

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de [HÖLDERLIN,_Friedrich ]

2008-06-18  | [Acest text ar trebui citit în francais]    |  Înscris în bibliotecă de Guy Rancourt



à Siegfried Schmid

I

De nouveau un bonheur est vécu. La dangereuse sécheresse guérit,
Et l’âcreté de la lumière ne roussit plus les fleurs.
Ouverte de nouveau reste une salle à présent, et salubre est le jardin,
Et par la pluie rafraîchie murmure la vallée éclatante,
Haute par la végétation, s’enflent les ruisseaux et toutes les ailes
Entravées se risquent de nouveau dans le royaume du chant.
Plein d’êtres joyeux est l’air à présent, et la ville, et le bois est
Tout autour rempli par les paisibles enfants du ciel.
Volontiers se retrouvent-ils, et s’égarent les uns les autres,
Insoucieux, et il semble que rien n’est en manque ou de trop.
Car ainsi l’ordonne le cœur, et la grâce à respirer,
Elle, la prédestinée, un esprit divin leur offre.
Mais les voyageurs sont aussi bien accompagnés, et ils ont
Assez de couronnes, et des chants, ils ont le thyrse sacré
Tout orné de grappes et de pampres avec eux, et l’ombre
Des pins ; de village en village on crie de joie, de jour en jour,
Et tels des chars attelés de fauves indomptés, ainsi tirent
Les monts par-devant et ainsi porte et se presse le sentier.

II

Mais penses-tu maintenant qu’ils ont inutilement ouvert
Les portes et rendu le chemin joyeux, les dieux ?
Et que vainement furent offerts pour l’abondance du festin les biens,
Outre le vin, de même encore les grains et le miel et les fruits ?
Offertes la lumière pourpre pour le chant festif et, fraîche et
Paisible pour un amical dialogue intime, la nuit ?
Tiens-tu à plus sérieux, alors garde-le pour l’hiver, et veux-tu
Te fiancer, aie de la patience, les fiançailles sont heureuses en mai.
À présent est une autre urgence, à présent viens et célèbre de l’automne
L’ancien rite, encore à présent fleurit la noblesse parmi nous.
Une seule chose importe en ce jour, la patrie, et qu’à la flamme
Festive du sacrifice chacun jette son bien propre.
C’est pourquoi nous couronne le dieu commun chuchotant autour des cheveux,
Et que la sensibilité propre, telle une perle l’a dissoute le vin.
C’est cela que signifie la table, la vénérée, quand, telles des abeilles
En rond autour du chêne, nous nous asseyons et chantons autour d’elle,
C’est cela le tintement des coupes, et pourquoi il force les âmes
Sauvages des adversaires à l’ensemble, le chœur.

III

Mais, de peur que, ainsi qu’à de trop subtils, ne nous échappe
Cette saison déclinante, je viens à sa rencontre à l’instant,
Jusqu’aux frontières du pays, où pour moi le cher lieu de la naissance
Et l’île baignent dans les eaux bleues du fleuve.
Sacré pour moi est ce lieu, sur ces deux rives, la roche aussi
Qui, avec le jardin et la maison, verte au-dessus de l’onde se soulève.
Là nous rencontrons-nous ; ô bienveillante lumière ! où pour moi en premier
L’un de tes plus émouvants rayons me toucha.
Là commença et commencera la vie d’amour, à neuf ;
Mais la tombe du père, je la vois, et je te pleure déjà ?
Pleure et garde et retiens l’ami, et entends la parole qui
Un jour, par un art céleste, me sauva du mal d’amour.
Un autre s’éveille ! je dois lui nommer les héros du pays,
Barberousse ! toi aussi, bienveillant Christophe, et toi,
Conrad ! comme tu tombais, ainsi tombent les forts, le lierre
Verdissait sur la roche et le château se couvrait de pampre bachique,
Pourtant le passé, comme l’à venir, est sacré aux chanteurs,
Et dans les jours de l’automne nous concilions-nous les ombres.

IV

Ainsi, songeant aux vigoureux, et par le destin le cœur exalté,
Inactifs nous-mêmes, et légers, mais cependant par l’Azur aussi
Considérés et pieux, tels les Anciens, les divinement attirés,
Les joyeux poètes parcourant joyeusement le pays, nous montons.
Grande est la croissance à l’entour. Là-bas, des plus extrêmes montagnes
Sont issus les jeunes gens en foule dévalant les collines.
Des sources bruissent par là-bas, et cent ruisseaux affairés
Parviennent jour et nuit jusqu’en bas, et fertilisent le pays.
Mais le Maître laboure le centre du pays, les sillons,
Les tire le fleuve Neckar, l’attire ici-bas, la bénédiction
Et viennent avec lui les brises d’Italie, la mer envoie
Ses nuages, elle envoie de brillants soleils avec lui.
C’est pourquoi va croître pour nous aussi, presque par-dessus tête, la vigoureuse
Abondance, car par ici furent-ils, ici dans la plaine, les biens,
Plus copieusement dispensés aux bien-aimés, aux gens du pays, cependant nul
Dans les monts là-bas ne leur jalouse les jardins, les vignobles
Ou bien l’herbe grasse et le blé, et les arbres écarlates
Qui, bordant le chemin, se dressent au-dessus des voyageurs.

V

Mais, tandis que nous contemplons, et que nous traverse la joie puissante,
Nous échappent le chemin et le jour, comme dans l’ivresse, au loin.
Car, de pampres sacrés couronnée, surgit déjà la ville,
La glorieuse, là-bas s’illumine sa tête de prêtresse.
Souveraine se dresse-t-elle et tendez-vous, les sarments et les sapins,
Haut vers le ciel jusqu’aux bienheureux nuages empourprés.
Sois-nous favorable ! à l’hôte et au fils, ô princesse de notre pays !
Heureuse Stuttgart, accueille amicalement l’étranger pour moi !
Car toujours as-tu apprécié le chant avec flûtes et lyres,
Comme je le crois, et le babil enfantin des romances, et des peines
Le suave oubli dans l’esprit présent,
C’est pourquoi réjouis-tu aussi volontiers le cœur des chanteurs.
Mais vous, vous aussi les grands, vous joyeux, qui de tout temps
Vivez et gouvernez, reconnus, ou bien aussi plus vigoureux
Quand vous œuvrez et créez dans la nuit sacrée et seuls souverains
Et tout-puissants vers le ciel attirez un peuple prescient,
Jusqu’à ce que les jeunes gens se souviennent des pères là-haut,
Emancipés et lucides se dressent devant vous les hommes prudents —

VI

Anges de la patrie ! ô vous, devant lesquels l’œil,
Aussi ferme soit-il, et le genou se dérobent, à cet homme esseulé,
Au point qu’il doit se retenir aux amis et prier les fidèles
Qu’ils supportent avec lui tout cet heureux fardeau,
Acceptez, ô bienveillants, la gratitude pour celui-ci et tous les autres
Que sont ma vie, mon bien parmi les mortels.
Mais la nuit vient ! hâtons-nous pour célébrer la fête d’automne
Aujourd’hui encore ! le cœur est comblé, mais brève est la vie
Et ce que ce jour céleste nous impose de dire,
Ce qui est à nommer, Schmid mon ami ! nous n’y suffirions pas à nous deux.
Les excellents, je les conduis vers toi, et le feu de joie tout en haut
Jaillira et plus sacré devra parler le mot plus audacieux.
Vois ! là, c’est pur ! et les dons amicaux des dieux,
Ceux que nous partageons, ils ne sont qu’entre les bien-aimés.
Rien d’autre — ô venez ! ô faites que ce soit vrai ! car seul, oui,
Je le suis et personne ne m’ôtera du front ce rêve ?
Venez et tendez-moi, vous bien-aimés, la main ! ce peut être assez,
Mais le plus grand plaisir, épargnons-le pour nos petits-enfants.

(Friedrich Hölderlin, traduction française de Patrick Guillot du poème «Stuttgart »)

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