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■ am învățat să supraviețuiesc și așa
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- - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - - 2010-03-03 | [Acest text ar trebui citit în francais] | Înscris în bibliotecă de Dolcu Emilia
V
Je vous le demande, peut-on vraiment avoir le moindre respect envers soi-même, lorsqu’on a eu l’audace de découvrir de la volupté dans sa propre déchéance. Ce que j’en dis, ce n’est pas poussé par quelque fade repentir. D’ailleurs, j’ai toujours eu horreur de dire : « Pardon, père, je ne recommencerai plus », non que je fusse incapable de le dire, mais au contraire peut-être, parce que je n’en étais que trop capable, et comment encore ! Dans ces cas-là, je me laissais pincer comme par un fait exprès, alors que je n’étais coupable ni de près ni de loin. Ça, alors, c’était le plus dégoûtant de tout ! ce faisant et derechef, je m’attendrissais, je me repentais, je versais des larmes et me blousais moi-même, et là, il n’était plus question de comédie. C’était mon cœur qui me jouait ce tour de cochon… Et là, il n’y avait plus à accuser les lois de la nature, ces mêmes lois qui m’ont traité si injustement, sans arrêt, durant toute ma vie. Soulever tous ces souvenirs dégoûte, mais ce furent des moments dégoûtants. Car, une minute plus tard, je me rendais compte avec rage que tout cela n’était que mensonge, un mensonge révoltant, une comédie, je veux dire tous ces repentirs, ces attendrissements, ces promesses de régénération. Vous me demanderez pourquoi je me contrefaisais et me tourmentais ainsi ? Réponse : parce que je m’ennuyais vraiment trop à rester les bras croisés ; c’est pour cela que je me lançais hardiment dans la contorsion. Ma parole ! Observez-vous un peu mieux vous-mêmes, messieurs, alors, vous comprendrez que c’est comme cela. Je m’inventais des aventures, je m’inventais une vie, pour avoir vécu quand même, tant bien que mal. Que de fois il m’est arrivé – tenez, à titre d’exemple – ne serait-ce que de prendre la mouche, comme ça, sans raison, exprès ; et je le savais moi-même que je l’avais prise pour rien, que je m’étais monté, mais on arrive à s’échauffer à un tel point qu’à la fin, parole d’honneur, on se retrouve vexé pour de bon. Toute la vie, j’ai été poussé à me lancer dans des numéros de ce genre, si bien que j’ai fini par perdre tout empire sur moi-même. Et puis aussi, et même deux fois, j’ai voulu me forcer à tomber amoureux. C’est que j’au souffert, messieurs, je vous l’assure. Au fond de soi-même, on ne croit pas qu’on souffre, il y grouille même un peu d’ironie, mais on souffre quand même pour de bon, dans toutes les règles ; j’étais jaloux, je sortais de mes gonds…Et tout cela par ennui, messieurs, rien que par ennui : l’inertie m’accablait. Car le fruit direct, légitime, immédiat de la conscience, c’est l’inertie, c’est le croisement-de-bras délibéré. J’y ai déjà fait allusion plus haut. Je le répète, je l’archi-répète : si tous les hommes directs et les hommes d’action sont actifs, c’est précisément parce qu’ils sont obtus et bornés. Comment expliquer cela ? Et, comme ceci : ayant l’esprit borné, ils prennent les causes immédiates et les causes secondaires pour les causes premières, et se convainquent ainsi, plus vite et plus facilemet que les autres, qu’ils ont trouvé le fondement indiscutable de leur activité, et la-dessus, ils se calment ; et cela, c’est le principal. Car, pour commencer à agir, il faut au préalable être pleinement rassuré, et ne plus conserver le moindre doute. Or, comment voulez-vous que je me rassure, moi, par exemple ? Où sont les causes premières sur lesquelles je pourrais m’appuyer, où est mon fondement ? Où voulez-vous que je les prenne ? je m’exerce à la réflexion et par conséquent, pour moi, toute cause première en amène immédiatement une autre encore plus première, et ainsi de suite à l’infini. Telle est présicément l’essence de toute conscience et de toute réflexion. Donc là, on retombe sur les lois de la nature. Et alors, qu’est-ce qui en résulte finalement ? Et, la même chose. Rappelez-vous : tout à l’heure, je vous parlais de vengeance. (Mais vous n’êtes sûrement pas allé au fond des choses.) Je vous l’ai dit : l’homme cherche à se venger parce qu’il trouve cela juste. Donc, il a trouvé une cause première, un fondement : en l’espèce, la justice. Comme cela, il est rassuré de tous les côtés, et par conséquent il se venge avec assurance et avec succès, convaincu qu’il est de faire quelque chose d’honnête et de juste. Or moi, je n’y vois aucune justice, je n’y trouve aucune vertu, et par conséquent, si j’entreprenais de me venger, ça ne pourrait être que par méchanceté. Ėvidemment, la méchanceté pourrait l’emporter sur tout, sur tous mes doutes, et par conséquent me servir avec un succès certain de cause première, précisément parce que ce n’est pas une cause du tout. Mais que faire si je ne suis même pas méchant ? (Car c’est bien par là que j’ai commencé, tantôt.) Ma hargne – et une fois de plus par suite de ces maudites lois de la conscience – se décompose chimiquement. Hop ! Et voilà l’objet volatilisé, les raisons évaporées, le coupable disparu ; l’offese cesse d’être une offense pour devenir fatalité, quelque chose comme une rage de dents dont personne n’est responsable, ce qu’il fait qu’il ne me reste toujours que la seule et même issue : cogner encore plus douloureusement contre le mur. Alors, comme on n’a pas trouvé de cause première, on y renonce. Et si j’essayais de me laisser emporter par mon sentiment les yeux fermés, sans raisonner, sans cause première, en faisant taire ma conscience, ne serait-ce que pour un temps, si je me mettais à haïr ou à aimer – qu’importe – tout plutôt que de rester les bras croisés ? Après-demain, dernier délai, je commencerais à me mépriser de m’être blousé moi-même en connaissance de cause. Résultat : bulle de savon et inertie. Ah, messieurs ! C’est que si je me crois intelligent, c’est peut-être uniquement parce que, toute ma vie, je n’ai jamais rien pu entreprendre ni achever. Admettons que je suis un bavard inoffensif, un assommant bavard, comme nous tous, admettons-le. Mais qu’est-ce qu’on y peut, l’unique et directe mission de tout homme intelligent est de bavarder, c’est-à-dire de transvaser volontairement du creux dans du vide. |
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