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PATMOS
poezie [ ]

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de [HÖLDERLIN,_Friedrich ]

2008-06-16  | [Acest text ar trebui citit în francais]    |  Înscris în bibliotecă de Guy Rancourt



au landgrave de Hombourg

Est proche
Et rude à saisir le dieu.
Mais où est le péril, croît
Le salutaire aussi.
Dans les ténèbres habitent
Les aigles et sans crainte vont
Les fils des Alpes franchissant l’abîme
Par des passerelles légèrement bâties.
C’est pourquoi, comme sont amoncelées à l’entour
Les cimes du temps, et que les bien-aimés
Habitent proches, s’exténuant sur
Les monts les plus séparés,
Donne ainsi l’eau innocente,
Ô donne-nous les ailes du sens le plus fidèle
Pour traverser et pour revenir.

Ainsi parlais-je, comme m’enleva
Plus rapide que je le présumais,
Et loin, là où jamais je
Ne songeais venir, un Génie,
Hors de ma propre maison. On voyait poindre
Entre chien et loup, comme je passais,
La forêt ombragée
Et les ruisseaux nostalgiques
De chez nous ; jamais n’avais-je connu ce pays ;
Bientôt cependant, en une fraîche splendeur,
Mystérieuse
En une buée d’or, fleurit
Rapidement épanouie,
Avec la course du soleil,
Avec mille sommets embaumant,

Pour moi l’Asie, et ébloui cherchais-
Je quelque chose que je connaissais, car inhabituelles
M’étaient ces larges avenues où descendant
Du Tmolos roule
Le Pactole paré d’ors,
Et le Taurus se dresse, et le Messogis,
Et, rempli de fleurs des jardins,
Un calme feu, mais dans la lumière
Fleurit bien haut la neige argentée,
Et témoin de la vie immortelle
Aux parois inaccessibles
Immémorial pousse le lierre, et sont supportées
Par de vivantes colonnes, cèdres et lauriers,
Les majestueux,
Les palais divinement bâtis.

Mais bruissent autour des portes de l’Asie
S’étirant ça et là
Dans la plaine marine incertaine
Bien assez de routes sans ombre,
Cependant il connaît les Îles, le marin.
Et comme j’entendis
Que l’une des proches
Était Patmos,
Me prit le très fort désir
D’y aborder et d’y
Approcher la grotte obscure.
Car ce n’est pas, telle que Chypre
La riche en sources, ou
L’une des autres,
Avec magnificence que réside Patmos,

Mais hospitalière
Dans une plus pauvre maison
Est-elle néanmoins,
Et quand d’un naufrage ou pleurant
Après le pays ou
L’ami défunt
L’approche quelque
Étranger, l’écoute-t-elle volontiers, et ses enfants,
Les voix du brûlant bocage,
Et, où le sable dévale et se fissure
La surface du rocher, les sons,
Elle les écoute et affectueusement résonne
En écho des pleurs de l’homme. Ainsi prit-elle soin
Jadis du bien-aimé de Dieu,
Du Voyant qui dans une heureuse adolescence était

Parti avec
Le Fils du Très-Haut, inséparable, car
Il aimait, le porteur d’orages, la candeur
De l’adolescent et il voyait, l’homme attentif,
Le visage de Dieu exactement,
Comme, au mystère de la vigne, ils
S’asseyaient ensemble, à l’heure de la Cène,
Et dans la grande âme, pressentant paisiblement, la mort
Qu’annonça le Seigneur, et le suprême amour, car jamais assez
N’eut-il, pour dire quelque chose de la bonté,
De mots, à ce moment-là, et pour divertir, comme
Il la voyait, la colère du monde.
Car tout est bon. Puis il mourut. Beaucoup serait
À dire là-dessus. Et ils le virent, les amis, regarder en vainqueur,
Ce plus joyeux, une dernière fois encore,

Cependant s’affligeaient-ils, comme maintenant
Était venu le soir, étonnés,
Car une grande décision avaient-ils dans l’âme,
Ces hommes, mais ils aimaient sous le soleil
La vie, et ne voulaient pas délaisser
La face du Seigneur
Et leur pays. Était enfoncé,
Tel le feu dans le fer, cela, et allait
À leur côté l’ombre de l’aimé.
C’est pourquoi leur fut envoyé
L’esprit, et certes trembla
La maison et l’orage de Dieu roulait
Au loin tonnant au-dessus
Des têtes pressentantes, comme, gravement pensifs,
Étaient réunis les héros de la mort,

À l’instant, comme il les quittait
Encore une fois leur apparut-il.
Car à l’instant s’éteignit le jour du soleil,
Le royal, et se brisa
Le rayonnant-tout-droit,
Le sceptre, souffrant divinement, de lui-même,
Car cela doit revenir
En un meilleur temps. Cela n’eût pas été bien
Maintenu, plus tard, et eût été brusquement rompue, infidèle,
L’œuvre des hommes, et ce fut une joie
Dès lors,
D’habiter dans une nuit plus aimante, et de garder
Dans les yeux candides, fixement,
Des abîmes de sagesse. Et verdoient
Au fond des montagnes aussi de vivantes images,

Cependant est redoutable comment ça et là
Sans cesse il disperse au loin le vivant, Dieu.
Car déjà la face
Des plus chers amis est à délaisser
Et bien loin par-delà les monts faut-il aller
Seul, où doublement
Reconnu, unanime
Était l’esprit céleste ; et ce n’était pas prédit, mais
Ça empoigne les cheveux, présent,
Quand vers eux soudain
Se hâtant au loin regarde en arrière
Le dieu, et prêtant serment,
Afin qu’il retienne, comme à des cordes dorées
Entravé désormais,
Le mal en le nommant, ils se tendirent les mains —

Mais quand meurt ensuite
Celui à qui le plus souvent
La beauté s’attachait, qu’en cette forme
Était une merveille, et les célestes la montraient
Du doigt, et quand, une énigme éternelle l’un pour l’autre,
Ils ne peuvent se saisir
L’un l’autre, ceux qui vivaient ensemble
Dans la mémoire, et ce n’est pas que le sable ou
Les saules qui étaient emportés au loin et les temples
Empoignés, quand la gloire
Du demi-dieu et des siens
Se dissipe et que sa face elle-même,
Le Très-Haut la détourne
En outre, qu’il n’est plus nulle part un
Immortel à voir au ciel ou
Sur la terre verdoyante, — qu’est-ce ?

C’est le lancer du semeur, quand il saisit
Avec la pelle le froment,
Et le jette vers la clarté, le balançant par-dessus l’aire.
Lui tombe la balle aux pieds, mais
À la fin vient le grain,
Et ce n’est pas un mal, si quelques uns
Vont s’égarer et que de la parole
Expire le son vivant,
Car l’œuvre divine ressemble aussi à la nôtre,
Le Très-Haut ne veut pas tout à la fois.
En vérité le fer, le produit la mine,
Et la résine incandescente, l’Etna,
Ainsi aurais-je la richesse,
Une image à imager, et de même
À contempler, tel qu’il fut, le Christ,

Mais si quelqu’un s’éperonnant lui-même,
Et parlant tristement, en chemin, comme j’étais sans défense,
M’assaillait, que j’en fusse surpris, et de ce dieu
L’image, que pût l’imiter un valet —
En colère manifestement vis-je une fois
Les seigneurs du ciel, non que je dus être quelque chose, mais
Pour apprendre. Bienveillants sont-ils, mais le plus haïssable leur est,
Aussi longtemps qu’ils règnent, le faux, et elle ne vaut
Alors, l’humanité entre les humains, plus rien.
Car eux ne gouvernent pas, mais gouverne
Le destin immortel et se transforme leur œuvre
D’elle-même, et va-t-elle en hâte vers sa fin.
Quand en effet plus haut ira la céleste
Marche triomphale, sera nommé, à l’égal du soleil,
Par les forts, l’exultant Fils du Très-Haut,

Un signe de ralliement, et ici est la baguette
Du chant, qui pointe en bas,
Car rien n’est commun. Les morts sont éveillés
Par elle, ceux qui ne sont pas encore captifs
De la matière brute. Mais attendent
Bien des yeux timides
Pour contempler la lumière. Ils ne veulent pas
Fleurir sous un rayon acéré,
Quoique cette bride d’or maintienne leur courage.
Mais quand, ainsi
Que de sourcils froncés,
Du monde oublié
La force calmement lumineuse descend d’un écrit sacré, peuvent-ils,
Se réjouissant de la grâce,
S’exercer à ce calme regard.

Et quand les Célestes à présent,
Comme je crois, m’aiment ainsi,
Combien plus encore Toi,
Car je sais une chose,
Qu’en effet la volonté
Du Père éternel prévaut
Pour Toi. Calme est son signe
Dans le ciel tonnant. Et quelqu’un se dresse là-dessous
Sa vie durant. Car vit encore le Christ.
Mais ils sont, les héros, ses fils,
Tous venus, et les écrits sacrés,
De lui, et l’éclair, l’élucident
Les actes de la terre jusqu’à présent,
Une course irrésistible. Mais il est là. Car ses œuvres
Lui sont toutes conscientes depuis toujours.

Depuis longtemps, trop longtemps déjà est
La gloire des Célestes invisible.
Car ils doivent presque nous guider
Les doigts, et honteusement
Nous ravit le cœur une violence.
Car le sacrifice est voulu par chacun des Célestes,
Mais quand l’un commence d’être négligé,
Cela n’apporte jamais rien de bon.
Nous avons vénéré la Terre Mère,
Et nous avons plus récemment vénéré la lumière du soleil,
Ignorant, mais le Père aime,
Lui qui partout gouverne,
Le plus souvent, que soignée devienne
La lettre immuable, et l’existant bien
Interprété. À cela se plie le chant allemand.

(Friedrich Hölderlin, traduction française de Patrick Guillot du poème « Patmos»)

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